La traçabilité de la mesure


L’objectif de cette exigence est en fait d’assurer l’uniformité internationale des mesures et leur traçabilité au Système international d’unités (SI). Cette traçabilité est la condition indispensable à la cohérence des mesures entre entreprises au niveau d’un pays ou, plus généralement, au niveau international et permet leur comparaison. 

Selon le VIM (définition reconnue par l’ISO 9000:2015), la traçabilité métrologique est la propriété d’un résultat de mesure, selon laquelle ce résultat peut être relié à une référence par l’intermédiaire d’une chaîne ininterrompue et documentée d’étalonnages, dont chacun contribue à l’incertitude. L’identification des équipements de mesure est un élément-clé permanent qui permet de remplir l’exigence de traçabilité de manière individuelle sur chaque équipement. 

La maîtrise du réglage de l’équipement est censée garantir la pérennité de la traçabilité. L’entreprise doit mettre en place un processus en cas de détection d’un équipement inadapté (équipement de mesure inapproprié ou non conforme). Ce processus doit permettre d’empêcher l’utilisation de l’équipement, d’évaluer les conséquences de la diffusion de résultats potentiellement non valides (analyse de risques) et d’identifier les éventuelles actions à mettre en œuvre.

 Attention, cependant, la traçabilité des moyens de mesure est une condition nécessaire mais pas suffisante pour assurer la traçabilité du processus de mesure. Car c’est bien le résultat final, à savoir le processus de mesure, qui doit être raccordé. Il est donc nécessaire de savoir comment est utilisé le moyen pour assurer la traçabilité. La métrologie ne s’arrête pas à la gestion des moyens de mesure. La gestion des moyens est une activité communément affectée à un service centralisé, à savoir la métrologie. Dans ce cas de figure, c’est à elle qu’il revient de remplir les exigences de ce paragraphe (notamment le point b). 

Il est également possible que cette activité soit remplie directement par les services concernés et non pas centralisée. Cette stratégie a certains avantages, comme la gestion au plus proche de l’utilisation et du besoin, l’économie de personnel, mais aussi des inconvénients (visibilité globale moins bonne, stratégies de gestion disparates, compétences métrologiques moins pointues, fonction souvent moins bien suivie). La responsabilité de l’organisation de la métrologie et, notamment dans ce paragraphe, la traçabilité des moyens doivent être identifiées afin de s’assurer que les exigences soient bien remplies (voir NF EN ISO 10012 paragraphe 5.1). 

Intervalle d’étalonnage et/ou de vérification ? 


Faut-il étalonner et/ou vérifier les équipements à intervalles spécifiés, communément appelés périodicités? L’étalonnage à intervalles spécifiés n’est pas obligatoire.

 Il suffit en effet de s’assurer que l’équipement a été au minimum étalonné/vérifié juste avant son utilisation (par exemple, utilisation suite à la mise en sommeil d’un équipement). Un étalonnage/vérification initial de l’équipement est toutefois obligatoire. Si des intervalles sont spécifiés, ils doivent être justifiés. Mais alors, comment choisir l’intervalle d’étalonnage et/ou de vérification? Dès la mise en place initiale des normes ISO 9000, l’objectif des opérations d’étalonnage/vérification périodique a été de garantir la traçabilité métrologique aux étalons nationaux ou internationaux et d’identifier des défauts de mesurage (biais, dérive, instabilités…) ayant potentiellement altéré les mesures réalisées antérieurement. 

Il est vrai que l’étalonnage peut intervenir beaucoup trop tard –son exploitation permet de confirmer, ou non, la validité des mesures antérieures– et il n’apporte pas de garantie pour l’avenir. Par ailleurs, il est important de préciser que l’étalonnage ne concerne que le moyen de mesure et ne valide pas le processus de mesure complet. 

C’est ainsi que des organismes tels que l’Organisation internationale de métrologie légale (OIML), le National Conference of Standards Laboratories International (NCSLi) aux États-Unis et le Bureau de normalisation de l’aéronautique et de l’espace (BNAE) en France, dès 1996, ont publié des guides permettant d’aborder plus rationnellement la problématique, avec, en particulier, des méthodes de base qui font encore référence aujourd’hui. 


Il s’agit du suivi de  dérive et de dispersion dans le temps, du temps d’utilisation, de l’ajustement en escalier, des contrôles intermédiaires (boîte noire), des approches statistiques (familles, séries de fabrication, etc.). 

Un peu plus tard, l’International Laboratory Accreditation Cooperation (ILAC) et le NCSLi, au travers des documents G24 pour le premier et RP1 pour le second, ont identifié des méthodologies très complètes. 

En France, le fascicule FD X 07-014 et la méthode Opperet du CFM décrivent plusieurs solutions pour des applications concrètes dans certains domaines. Le fascicule FD X 07-014, en particulier, propose une méthode facilement utilisable et performante pour les calibres (piges, tampons, cales et, de façon générale, tout étalon pour lequel la dérive est modélisable).

 Dans ce cas particulier, l’étalonnage/vérification «périodique» peut être défini de façon fiable grâce à des analyses statistiques de dérive. Quant à la méthode Opperet, elle est basée sur une analyse de la criticité des éléments liés à un processus de mesure (risque de dérive, capabilité de l’instrument et du processus de mesure, facteurs aggravants, coût). 

La méthode propose neuf points de réflexion qu’il convient de noter et pondérer. Des laboratoires et des prestataires de services mettent en œuvre également leur expertise et des outils dédiés basés sur: les objectifs de performance des processus de mesure impliquant les moyens de mesure et la contribution de ces derniers; les conditions d’utilisation (environnement stable et protégé, milieu difficile, mouvements fréquents, etc.); l’exploitation des résultats d’étalonnage/vérification du moyen concerné; des analyses statistiques relatives au comportement de modèles, séries d’équipements déterminés, etc.; des actions de maintenance préventive systématiques ou conditionnelles et de surveillance mises en œuvre. 

Au-delà de l’équipement, les surveillances concernent les processus de mesure, comme décrit dans le document (voir également le guide «Surveillance des processus de mesure»), et complètent utilement les opérations d’étalonnage ou de vérification, en lien permanent avec la mise en place d’actions de maintenance préventive (anticipation de remplacement de composants suite à détection d’une dérive anormale par exemple).